Platine vinyle
Origine : Allemagne
Entraînement : par courroie plate
Vitesses : 33 & 45 tours / minute
Pleurage et scintillement : < 0,12 %
Variation de la vitesse de rotation : +/- 0,33%
Plutôt connu pour la réalisation d’enceintes acoustiques, peu d’audiophiles ont en mémoire que le constructeur Allemand ELAC avait conçu et réalisé des platines vinyles à l’aube des années 50.
L’aventure du vinyle redémarre en 2016 avec un modèle unique baptisé Miracord 90 Anniversary dont vous pourrez lire ou relire le banc d’essai dans ces pages ICI. Cette initiative de la part du constructeur avait pour principal objet la célébration du 90ème anniversaire de la marque.
Depuis, ELAC a souhaité élargir son offre de platines vinyle avec des modèles plus économiques dont la Miracord 60 passé présentement au banc de l’analyse.
De visu, la Miracord 60 a pas mal de points communs avec son aînée. Dans les grandes lignes, sa présentation assez semblable est tout aussi attrayante, luxueuse même. Cette platine bénéficie d’un socle en MDF renforcé de 5,5 kg qui repose sur 4 pieds en silicone spécialement développés pour elle. Ils assurent un découplage efficace du support sur lequel la platine est posée.
Ce socle est gainé d’une fine plaque en aluminium brossé de 2 millimètres d’épaisseur qui donne de la classe à l’objet. Miracord 60 adopte un lourd plateau en aluminium de 6,2 kg prenant appuie sur un sous plateau dont l’axe en acier trempé tourne sur une bille de rubis de 8 millimètres pour une friction minimale. Les roulements axiaux finement usinés sont en bronze de haute qualité.
Tout comme la Miracord 90, ce lourd plateau est entraîné par un moteur à courant continu avec une gestion électronique de la vitesse via une courroie plate. Ce moteur est découplé du châssis par un système d’amortissement un peu plus simple que celui de sa grande sœur, mais assure un fonctionnement silencieux. Outre l’amortissement en caoutchouc, les suspensions utilisées font appel à des matériaux qui ont fait leurs preuves dans le développement et la fabrication des haut-parleurs ELAC.
Miracord 60 est une platine entièrement manuelle. Les commandes sont réduites au minimum : une commande rotative pour sélectionner la vitesse de 33,33 tr/mn et 45 tr/mn, la position médiane mettant la rotation du moteur hors service. Pas de cordon secteur prisonnier du socle, mais une alimentation externe régulée fait aussi partie des détails qui font la différence.
Miracord 60 est pourvue d’un bras droit dont le corps est en fibre de carbone de belle facture avec un porte-cellule amovible coudé démontable, compatible avec la norme SME afin d’effectuer une installation aisée de la cellule phonocaptrice. Visuellement, ce bras différent de celui de celui du modèle Mircord 90 n’appelle pas de critiques négative. L’assemblage apparaît on ne peut plus sérieux.
Bien que le constructeur ne donne que peu de détails sur les éléments constitutifs de ce bras, ce dernier permet de monter une cellule de haut de gamme, à bobine mobile, comme cela a été réalisé pour ce test.
Contrairement, au modèle Miracord 90, la cadette est livrée sans cellule, ce qui n’est pas plus mal.
La face arrière comporte le connecteur d’alimentation séparée, un interrupteur général marche / arrêt et deux très belles fiches de connexions RCA permettant un choix plus libre de cordons de modulation.
Ecoute et impressions :
Les tests d’écoutes ont été effectués en auditorium avec les éléments suivants :
– Cellule phono à bobine mobile KOETSU Black
– Préamplificateur phono MOON 110 LP Mk2
– Palet-presseur / stabilisateur : MARK LEVINSON
– Accessoire : brosse dépoussiérage / antistatique ANALOG Relax AR-ASAB1
– Amplificateur intégré MOON 600i V2
– Enceintes acoustiques APERTURA Armonia Evolution
– Câble de modulation NORDOST Blue Haeven
– Câbles HP NORDOST Heimdall 2
Pour l’alimentation secteur : barrette NORDOST QB 8 Mk2, câbles secteur Leif Red Dawn de la même marque.
• Vinyles sélectionnés : Gershwin & sa musique ~ Frank Chacksfield – Soul Bossa Nova ~ Quincy Jones – Ted Heath Salutes Benny Goodman – Nameless & Stay Tuned ~ Dominique Fils-Aimé – La Folia de la Spagna ~ Gregorio Paniagua – Barry Lyndon ~ bande originale du film – All Time Favorite Melodies of Japan – La découverte ou l’ignorance ~ Tri Yann – Concertos Brandebourgeois N° 1,2,3 de Jean-Sébastien Bach ~ The English Chamber Orchestra ~ Direction Benjamen Britten – Workshop & Down Home ~ Chet Atkins – Shadow Hunter ~ Davy Spillane – A mémorial for Glenn Miller : the original members – « Jalousie » ~ Yehudi Menuhin et Stéphane Grappelli – The Complete ~ Mike Oldfield – Swinging Safari ~ Bert Kaempfert – Contrastes par Pachacamac – The Complete ~ Mike Oldfield – Shadow Hunter ~ Davy Spillane – Crucifixus ~ Jean-Christian Michel – Le Vaisseau de Pierre ~ Tri Yann – Quiet Nights ~ Diana Krall, etc…
Les petits plats dans les grands…
Préambule
Ce test revêt un caractère particulier dans la mesure où cette platine a volontairement été associée avec un ensemble audio de « compétition » – un ensemble qui ne laisse aucune place à l’imperfection – un ensemble où chaque élément qui le compose a fait par ailleurs l’objet d’une analyse détaillée, en association ou séparément.
Ensuite cette platine n’a pas été spécialement conçue pour fonctionner avec des cellules de haut de gamme. Cependant pour ce test, nous n’avons pas hésité à monter la légendaire cellule à bobine mobile Koetsu Black, très en vogue dans les années 80. Pour la compréhension de tous, cette cellule Koetsu a été entièrement « retypée » par le constructeur Japonais, ce qui en fait un produit tout à fait contemporain.
Philosophie musicale & esthétique sonore
Il ne faut pas énormément de temps pour se rendre compte que cette platine n’a rien de ridicule face à d’autres platines vinyle de gamme et de prix très supérieurs. En outre, cette platine et son bras acceptent sans rechigner le montage d’une cellule performante, de prix équivalent, voir supérieur à celui de la platine elle-même. J’irai même jusqu’à dire, qu’il ne faut pas s’en priver sous condition que la section phono ait un minimum d’atouts pour mettre en valeur vos précieuses galettes vinyles.
Vous mettez le disque en place, vous tamisez les lumières, et cette platine vous prend par la main pour vous conduire au cœur de la musique. La notion de plénitude prend ici un sens profond. Le miracle du support vinyle ne se fait pas attendre car il émane des écoutes un sentiment de « confort » qui finalement n’appartient qu’au(x) support(s) analogique(s).
Registres aigu & médium – Transparence
• La Folia de la Spagna ~ Gregorio Paniagua
Je dois reconnaître que le tandem Miracord 60 / Koetsu Black se montre magique, déconcertant, dans le bon sens du terme. Tout en conservant un équilibre subjectif et une splendide cohérence entre les différents registres, j’ai observé que le registre aigu filait réellement haut.
Si l’onctuosité est de mise, la Folia de la Spagnia se montre étincelante à tous points de vue. Les instruments baroques respirent l’authenticité. La sonorité boisée des flûtes et du cromorne tout comme celle de viole de gambe ou de la vielle à roue laissent paraître des sonorités riches et éclatantes.
Les instruments de musique qui s’aventurent dans le giron des fréquences médium sont particulièrement mis en lumière. Ainsi, la cithare, grelots, crotale, et castagnettes ou encore la guimbarde affichent une coloration du plus bel effet.
Cette superbe platine et la cellule constituent des « analystes » de premier ordre. Elles permettent de lever le voile sur l’ensemble de la prestation orchestrale en prenant soin de ne laisser de côté aucun détail. La sonorité du clavecin est ici à son avantage avec son caractère éblouissant. On y décèle le très beau grain de l’instrument, sa finesse et les différentes teintes qu’il peut revêtir en fonction des notes et de la façon dont l’interprète en joue. J’ai pu aussi déceler un grand nombre de nuances sur l’ensemble des instruments, tout comme leur aspect fruité réellement jouissif. Chaque instrument offre un détourage et une foule de détails démontrant que cette platine arrive à sculpter une véritable fresque musicale sous vos yeux et pour le plaisir de l’écoute.
Registre grave
• Barry Lyndon ~ bande originale du film
Allez !, on se le dit : le registre grave offre absolument toute les garanties d’une reproduction bien campée dans le grave. Les fréquences les plus basses de la Sarabande de Haendel sont prises en charge avec toute la bienveillance que requiert cette œuvre. Les contrebasses descendent au niveau attendu. Le suivi mélodique est net, bien défini, lisible. Le violoncelle est n’accuse pas davantage de limites objectives.
Le cas des roulements de timbales est, quant à lui, « phénoménale ». Non content de descendre à une belle profondeur, nous assistons à une restitution matérialisée, organique, de laquelle nous « sentons » aisément l’impact du marteau sur la peau de ces percussions. La manière dont l’instrument vibre fait aussi partie des belles découvertes et capacités à réagir proprement et promptement dans le bas du spectre. De plus, ces percussions offrent une enveloppe qui n’a rien à envier aux supports dématérialisés.
Cette platine et la cellule mises à l’épreuve explorent les soubassements avec une grande facilité qu’il convient de mettre à l’actif de chacune de ces références. Sur ce thème, nous voyons bien que le disque vinyle est loin d’avoir dit son dernier mot.
Dynamique – réactivité – rigueur
• The Complete ~ Mike Oldfield – Shadow Hunter
Selon les platines, les cellules, les préamplificateurs ou sections phono, la vivacité qui animent certains disques vinyles revêt parfois des caractéristiques différentes. Sans compter le rôle déterminant joué par l’amplificateur et les enceintes acoustiques.
L’écoute des extraits les plus échevelés consignés dans cette compilation de Mike Oldfield n’appelle que des commentaires élogieux. Le rythme est rendez-vous et le suivi mélodique se montrent en tous points d’une excellente rigueur. Autant dire que les « pulsions rythmiques » sont par instants explosives, bouillonnantes.
Par moment, on se surprend à taper du pieds pour accompagner la musique. Grâce à la cellule Koetsu, cette platine vinyle surprend à chaque instant, à chaque style de musique, à chaque passage par son entrain et sa philosophie musicale pétillante. Les guitares acoustique et électriques sont d’une rectitude incritiquable. Le jeu de batterie est aussi d’une excellente précision : les attaques sur la caisse claire et les coups de cymbales sont franches et nettes.
Les charges complexes et les accélérations sont prises en charge avec une efficacité redoutable, qui rendent la musique encore plus attachante et terriblement vivante.
Scène & espace sonore
• « Jalousie » ~ Yehudi Menuhin et Stéphane Grappelli
Quel bonheur d’écouter le duo Yehudi Menuhin ~ Stéphane Grappelli « grandeur nature ». Cette platine et la cellule mis en œuvre nous font bénéficier d’une scène sonore particulièrement holographique. Chacun de ces maîtres du violon prend une place bien définie de chaque côté de la scène sonore. Certains musiciens sont placés au centre, ou légèrement excentrés selon le souhait du preneur de son. Le positionnement précis de chaque interprète est donc clairement défini. On peut constater également qu’il y a beaucoup d’espace entre les différents musiciens, ce qui apporte une aisance supplémentaire dans l’expression générale.
Cette notion d’aération apporte une véritable bouffée d’oxygène à la musique, et surtout elle permet de mettre l’accent sur la manière dont chacun des violonistes exerce son talent respectif. Nous voyons bien que sur le même thème musical, Yehudi Menuhin et Stéphane Grappelli ont une technique radicalement différente, et cela s’entend très bien. Cela donne un aspect encore plus truculent à ces différentes pièces musicales « formulées » avec une magnifique éloquence.
Si le « plan de table » est clairement établi, ce couple platine / cellule va encore plus loin, notamment en matière de contrastes et de profondeur scénique. Les reliefs entre les deux violons, le piano et la contrebasse est d’une telle évidence que l’on imagine un quatuor à portée de nos oreilles, donc d’une présence de tout ce petit monde dans la pièce d’écoute.
Si je ne devais citer qu’une seule qualité de cet ensemble, c’est bien la spatialisation que je retiendrai. Cependant, ce n’est qu’une qualité parmi d’autres.
Séquence émotion – sens de l’expression
• Nameless ~ Dominique Fils-Aimé (30 cm / 45 tr/m)
• Stay Tuned ! ~ Dominique Fils-Aimé
Le grand et beau moment d’évasion arrive avec l’écoute de ces deux albums de Dominique Fils-Aimé. Avec cette platine, tout l’art du vinyle démontre sa valeur ajoutée musicale. J’ai retrouvé absolument tout (ou pas loin) ce qui procure les moments intenses d’émotion que j’obtiens avec mon propre système audio et / ou d’éléments performants testés régulièrement dans ces pages.
Le pressage qualitatif de Nameless et de Stay Tuned ! requiert une « lecture » qui doit être exempte de défauts. Eh bien, cette platine a les atouts nécessaires pour procurer une écoute naturelle, charnelle notamment sur les vocaux. La cellule choisie permet de tirer d’infimes substances du message musical et vocal. De surcroît, la grosse surprise vient de la présence « physique » de l’interprète dans la pièce d’écoute.
La prestation de Dominique Fils-Aimé est absolument divine. La diction, les respirations, les articulations sont d’une authenticité bluffante. Le côté humain ressort à merveille; de quoi vous procurer le grand frisson du jour. De surcroît, si le message musical se montre chaleureux, il est d’une limpidité et d’une ouverture qui procurent beaucoup de bonheur et une envie irrésistible d’enchaîner les albums jusqu’au dernier sillon, jusqu’à la dernière note.
Outre la pureté de la voix, sa texture charmante et envoutante, la contrebasse et les diverses percussions qui viennent égayer ce « parcours musical » apportent une touche « éclatante » grâce à une série d’harmoniques qui montrent comment les sons se propagent avec facilité dans le temps et l’espace.
• Shadow Hunter ~ Davy Spillane
Décidément, au fil des écoutes, cette platine n’a eu de cesse de me surprendre par sa facilité à reproduire une musicalité mélodieuse, savoureuse, et même enivrante lorsqu’il s’est agi de s’évader avec cet album Shadow Hunter de Davy Spillane.
Il est vrai que cet « attelage » plutôt atypique (Miracord 60 et cellule Koetsu Black) permet de tirer le meilleur parti d’un bon pressage et d’une bonne prise de son. Ici, la magie s’opère instantanément : il se passe quelque chose de différent que l’on perçoit aisément, mais qu’il est difficile de décrire. Tout à coup, la pièce d’écoute s’anime d’une atmosphère particulière au son du Uilleann Pipes qui délivre une sonorité réellement prenante et saisissante. J’ai réellement eu le sentiment que Davy Spillane faisait pleurer son instrument à travers les landes et paysages Irlandais.
La musique vous touche dans ce qu’elle a de plus profond. Le souffle des celtes se ressent à chaque note; vous le percevez facilement au travers du doigté de l’interprète. Celui-ci ne ménage pas ses efforts pour vous transmettre, par son talent, ses propres émotions et celui des musiciens qui l’accompagnent.
Secondée par une cellule à fort pouvoir expressif, la Miracord 60 a toutes les dispositions pour extraire du sillon la substantielle moelle musicale qui rendront vos séances d’écoutes enthousiasmantes.
Conclusion :
Pour un prix réellement démocratique, la platine Miracord 60 est un choix qui doit être envisagé lorsque l’on songe à s’initier au disque vinyle. Pour ceux qui souhaitent monter en gamme, ce choix se justifie d’autant plus, sous condition de choisir une cellule de qualité supérieure et, pourquoi pas, à bobine mobile. Bien équipée, cette platine peut alors rejoindre des systèmes audio expressifs. Avec Miracord 60 et une cellule digne de ce nom, vous pourrez alors goûter aux joies d’une écoute analogique de bon niveau avec quelques belles surprises à la clef.
Prix : 999 € (01/2022)