KEF BLADE
Conception : Grande Bretagne
Enceinte 3 voies / 5 haut-parleurs Uni-Q
Charge : bass-reflex
Sensibilité : 90 dB / 1w / 1m
Impédance moyenne : 4 ohms
Distorsion : < 0.5% de 40 Hz à 100 kHz
Réponse en fréquence : 28 Hz à 45 kHz – 6db
Puissance requise : 50 watts à 400 watts
Réponse en fréquence : 40 Hz à 35 kHz +/- 3db
Dimensions : ( H x L x P ) 159,0 x 36,3 x 54,0
La KEF Blade est l’aboutissement d’un travail de recherche et d’optimisation qui a duré pas moins de cinq années. Nous connaissons tous l’attachement que porte le constructeur Anglais à la reproduction la plus juste de la musique, et les récentes réalisations des série Q et R, mais aussi la LS – 50 nous montrent un savoir faire incontestable en matière d’enceintes acoustiques. A 26.000 euros la paire, la KEF Blade est une des enceintes acoustiques les plus chères du marché audiophile. Elle se positionne comme le vaisseau amiral de la « flotte » KEF, et le concepteur n’avait donc pas droit à l’erreur.
Les ingénieurs de chez KEF se sont vus accorder une totale liberté pour créer un concept intégrant nos nombreuses technologies. Ils ont ainsi mis au point un prototype révolutionnaire ne ressemblant à aucun autre, et offrant une image sonore comme aucune autre : le Concept Blade, première enceinte au monde « à source unique apparente ». Le concept repose sur une nouvelle architecture « réalisant le fameux point de source unique auquel tous les concepteurs de haut-parleurs aspirent ». Ceci, parce que les quatre haut-parleurs sophistiqués de graves ont été configurés pour que leurs centres acoustiques combinés occupent exactement le même point dans l’espace que celui de l’ensemble Uni-Q HF/MF ; le son semble alors émaner d’une seule source.
La KEF Blade est considérée comme une enceinte 3 voies, même si elle embarque 5 haut-parleurs dont 4 dédiés au registre grave. Les registre médium aigu est confié au fameux ensemble Uni-Q spécialement développé pour la Blade. Le registre médium est reproduit par le biais d’un cône hybride réalisé en alliage de lithium, magnésium, et aluminium. Pour le registre aigu, un tweeter concentrique à dôme en aluminium est encastré au centre du transducteur médium.
Sur le plan conceptuel et architectural, KEF a mis beaucoup de moyens en œuvre pour juguler les ondes stationnaires, et éviter que l’énergie des haut-parleurs de graves aussi puissants puisse se dissiper à l’intérieur de l’enceinte. Pour y parvenir, un montage rigide des haut-parleurs accolés dos-à-dos vient annuler les considérables forces cinétiques générées. Éliminant ainsi toute coloration induite par le boîtier de l’enceinte, « cette configuration efficace explique en partie la sonorité naturelle de Blade et sa performance musicale séduisante ».
Par ailleurs, KEF a veillé à compartimenter les haut-parleurs de grave. En effet, les paires jumelles de haut-parleurs de graves sont montées dans des compartiments distincts, séparés par une cloison interne. En augmentant la fréquence des ondes stationnaires internes, en les portant bien au-delà du point de transition, on élimine la nécessité de placer des matériaux amortissant susceptibles de nuire à la qualité des fréquences graves. Rien n’a été laissé au hasard dans la quête de la plus grande pureté.
Enfin, pour arriver à des fins musicales hors normes, le filtre passe-bas de la Blade utilise » les meilleurs composants actuellement disponibles, soigneusement sélectionnés au cours d’un processus d’auditions rigoureux de telle sorte que chaque section du parcours du signal soit optimisée pour obtenir une clarté maximale ». Le concepteur d’ajouter que « tous les éléments du filtre sont câblés à la main, par opposition au montage conventionnel sur circuit imprimé. Plus respectueux de l’environnement, ce processus optimise en outre la fiabilité du système et la qualité sonore, assurant la transmission du son dans les meilleures conditions qui soient ». Deux paires de connecteurs audio WBT de la meilleure qualité permettent bi-câblage ou la bi-amplification, assurant une transmission sans pertes et optimisant la reproduction des détails musicaux les plus fins. Les inter-connecteurs à vissage (brevet KEF) sont conformes aux normes audio les plus sévères ; ils simplifient par ailleurs l’installation en éliminant les connecteurs peu élégants.
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ECOUTE
Les tests d’écoute ont été réalisés en auditorium avec le matériel suivant : amplificateur ESOTERIC I – 03, Drive CLASSE AUDIO, Dac ESOTERIC D – 05, câbles modulation et HP YBA Diamond, câble numérique ESPRIT Structura, barrettes et filtres secteur FURUTECH E-TP 60, E-TP 80, F-TP 615, et Pure Power 6.
CD Utilisés : Tri Yann – Générations – Tri Yann avec l’Orchestre National des Pays de Loire – Valéria interprété par le Modern Jazz Quartet – Quiet Nights par Diana Krall – Le Cœur des Etoiles » interprété par Jean-Christian Michel – Requiem de Mozart dirigé par Herbert Von Karajan.
1° Timbres
Les premières minutes d’écoutes laissent présager des timbres authentiques sur tout le spectre audible. Je dois toutefois avouer que j’ai eu un peu de mal à cerner à sa juste valeur le tempérament musical de cette enceinte acoustique (nous y reviendrons un peu plus loin). Il serait mesquin de porter des critiques sur la qualité des timbres, car ceux-ci sont restitués avec une belle élégance. Le registre grave descend dans des profondeurs abyssales qui lui donne une certaine souveraineté par rapport à une concurrence bien connue. Sur tous extraits écoutés, ce registre grave est très précis, bien défini, et on appréciera en particulier les harmoniques de la basse fretless dans certains extraits de » Tri Yann – Générations « , par exemple.
Le registre aigu apparaît quant à lui, très doux, et légèrement feutré. Il s’articule autours d’un registre médium qui n’a peut-être pas l’aspect fouillé des autres modèles de la gamme. A noter que l’utilisation de diverses barrettes secteur de marque FURUTECH ont une influence non négligeable sur les teintes sonores et le détourage des instruments. Si le détourage des instruments est correct, il ne figurera pas forcément au palmarès des enceintes de références en ce domaine.
A vrai dire, la douceur générale, sans doute destinée à privilégier une transcription naturelle, masque très légèrement certaines subtilités. Sur différents extraits de » Tri Yann avec l’Orchestre National des Pays de Loire « , j’ai eu quelques difficultés à retrouver le faible tintement du triangle, ou l’intervention du cromorne.
Dans un autre domaine, les coups de cymbales sur » Valéria » interprété par le Modern Jazz Quartet n’ont pas ni la finesse, ni la saveur attendues. Un aspect un peu fade, voir même étouffée, se dégage de chacune de ces deux écoutes.
Sur les vocaux (Quiet Nights par Diana Krall), on a affaire à une écoute vraie, « débarrassée » de toute trace de dureté, les « S » ne sifflent pas, et le naturel prend effectivement le dessus. Sur » Valéria » joué par le Modern Jazz Quartet, le difficile jeu de vibraphone est maîtrisé. Même si les différentes variations de l’instrument ne sont pas si étendues que j’aurais pu le souhaiter, l’instrument offre une palette de timbres aux couleurs variées.
2° Transparence – Fluidité
Comme sur toutes les enceintes KEF de dernières générations, le système Uni-Q a démontré, une fois encore, ses facultés à restituer une musicalité dépourvue de toutes formes de crispations. On retrouve, en outre, sur Quiet Nights de Diana Krall une superbe fluidité d’ensemble qui permet aux différents plans de s’enchaîner avec une belle aisance, et un aspect savoureux. Ce système de transducteur est destiné à rendre l’écoute naturelle, et asseoir une transparence acceptable.
La grande KEF a de bons atouts pour décortiquer le message musical, mais à y regarder de plus près, le voile n’est pas totalement levé. L’orchestration de » Quiet Nights » par Diana Krall fourmille de détails et de subtilités qui ne sont pas évidentes à cerner au premier abord.
Dans un autre style, le » Cœur des Etoiles » interprété par Jean-Christian Michel nous met en relation avec une musique authentique de laquelle émane des ambiances particulières et certains reliefs propres à toutes formes de musiques dites sacrées, mais … sans plus !
3° Dynamique – réactivité – rigueur
Reconnaissons tout de même que sur ces critères, la KEF Blade montre de petites failles. Le côté réactif n’est pas au rendez vous, et une certaine mollesse est constatée quels que soient les thèmes ou styles musicaux abordés. De façon très objective, nous sommes au moins trois personnes à partager ce sentiment d’un manque de rigueur flagrant. Sur les charges complexes et les grandes orchestrations, la musique a même tendance à devenir un peu confuse, pour ne pas dire brouillonne. Je ne pense absolument pas que l’amplificateur ESOTERIC I – 03 soit en cause, même s’il aurait été nécessaire d’associer à la Blade un amplificateur deux fois plus musclé et sans doute plus puissant. Cela laisse à penser que la KEF Blade est difficile à positionner, et compliquée à mette en œuvre au sein d’un environnement domestique.
La montée en puissance des orchestrations s’opère de façon un peu molle, et le déroulement des différentes plages musicales « s’effectue au ralenti ». De fait, le » Requiem de Mozart » par Karajan perd vraiment tout son attrait et son manque de panache devient presque monotone.
Dans un autre registre, et malgré une scène sonore de grande ampleur, la confusion s’installe lors de l’écoute de » Tri Yann avec l’Orchestre National des Pays de Loire « , où se mêlent une grande variété d’instruments de musique. Il est impossible de distinguer les chœurs de l’orchestre, et lorsque la batterie, la guitare électrique, les percussions se superposent, il en ressort une sonorité d’ensemble assourdissante et globalement décevante.
4° Scène et image sonore
Les tests d’écoutes ont été effectués dans des conditions optimales au sein d’un auditorium de référence d’une superficie de 60 m², avec du matériel largement confirmé par ailleurs dans ses fonctions de hautes performances musicales.
Si la scène sonore est d’une remarquable dimension, l’implantation dans un espace sonore de grande dimension ne débouche pas forcément sur une restitution sonore de « très haut niveau » . En effet, la KEF Blade ne se contentera pas d’une pièce volumineuse pour s’épanouir, elle requiert quasiment un espace sonore de la dimension d’un « hall de gare » ; alors quid de son installation dans un environnement domestique ?
Par ailleurs, la KEF Blade souffre de deux défauts majeurs. La directivité oblige l’auditeur à être campé dans un axe d’écoute très étroit pour bénéficier de bons effets stéréophoniques et d’un équilibre gauche / droit optimal. La marge de manœuvre est extrêmement réduite, de l’ordre de cinq centimètres. La KEF Blade a aussi un autre inconvénient : elle oblige l’auditeur à se positionner à plus cinq mètres des enceintes acoustiques, rendant ainsi l’exploitation domestique totalement improbable dans la majeure partie des cas de figures, et obligera le possesseur de ces enceintes à utiliser un amplificateur de puissance hors normes.
Autant le dire, les cinq heures d’écoutes ne m’ont permis de porter un jugement tranché, et en tout cas positif, en ce qui concerne l’étagement des plans et l’image sonore dans leur ensemble. Toutefois, afin de garder une once d’objectivité (toutes proportions gardées), l’étagement des plans permet de se faire une bonne idée du positionnement des musiciens dans la pièce d’écoute. Sur des extraits de musique où interviennent un petit groupe de musiciens, on sent qu’il y a de l’espace entre les interprètes. La scène sonore n’est nullement confinée, et un aspect aérien laisse filer une musicalité déliée : elle suggère un sens de l’ouverture qui laisse les interprètes s’exprimer librement.
5° Communication avec l’auditeur
La neutralité et la restitution naturelle revendiquées par KEF auraient du se solder par une forme de communication d’exception. L’écoute à plus de cinq mètres, même à haut niveau d’écoute ne permettent pas réellement de goûter au charme de la justesse des timbres si chère aux concepteurs de cette enceinte acoustique. Par rapport aux autres enceintes de la marque, ou de marques concurrentes, il s’installe une distance entre l’auditeur et le(s) interprète(s). Certains détails, certaines subtilités sont laissées sur le bord du chemin, ou passent simplement à la trappe.
On pourrait me répondre que lorsque l’on va à un concert, l’auditeur n’est pas forcément placé devant l’orchestre et qu’une distance significative est toujours là pour mettre une barrière entre l’auditeur et les interprètes. Mais, si la salle est savamment conçue, cette distance n’a pas la même signification que dans le cas d’une écoute audiophile, et la musique prend toute sa place au sein de la salle de concert.
Dans les circonstances et les conditions d’écoutes dont j’ai bénéficié, j’ai trouvé que la musique manquait de nuances, peut être de corps, et je n’ai pas trouvé une matérialisation des instruments qui vaille la peine d’être citée en référence.
Conclusion :
Depuis, sa date de sortie en 2011, la presse spécialisée n’a cessé d’encenser les qualités de cette enceinte acoustique, moi pas ! Les difficultés liées à sa mise en œuvre, à l’implantation dans un espace domestique ne permettent pas à cette enceinte de se placer sur la plus haute marche du podium des produits haute fidélité dits d’exception. La Blade est une enceinte contraignante à exploiter, susceptible, qui requiert du matériel difficilement accessible en France, et surtout un environnement (pièce d’écoute) adapté et d’un volume gigantesque.
Cotations : |
Musicalité : contestable
Appréciation personnelle : sans enthousiasme
Rapport musicalité / prix : sans objet |
Prix : 26000 € (03/2013)
Test d’écoute réalisé par
Lionel Schmitt
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