L’édito de Lionel
Le duel vintage – contemporain a-t-il du sens ?
En 03-2008, j’évoquais dans cette rubrique la question du choix de matériel « vintage » pour se constituer un ensemble musical. Il est vrai que le matériel ancien a son charme, tout au moins sur l’aspect esthétique. Je laisserais de côté la question des enregistreurs analogiques (cassettes ou bobines libres), DAT et DCC, qui sont des éléments un peu à part.
Depuis longtemps, sur les forums et les réseaux sociaux, il n’est pas rare de voir certains intervenants opposer les appareils vintage aux appareils contemporains.
Le curseur serait même porté à 1975 – l’année charnière, selon laquelle tous les produits réalisés postérieurement seraient systématiquement de mauvaise qualité au sens large. Dès lors, les produits actuels seraient musicalement moins bons, moins bien construits, peu fiables, intégrant des composants de moins bonne, voir piètre qualité.
De tels propos interpellent tout de même. Est-ce bien raisonnable de vouloir opposer deux époques de la haute fidélité ? Qu’y a-t-il de caché derrière ces arguments. Ces critiques « toutes faites » n’ont malheureusement pas de fondements et encore moins de sens. Ce faux débat, ou débat d’arrière garde, n’apporte pas non plus un éclairage à ceux qui sont en pleine réflexion pour se constituer un ensemble musical de qualité.
Si je laisse de côté, le côté affectif porté aux éléments HIFI anciens, je constate que dans beaucoup de cas, les produits actuels apportent à minima une ouverture que les produits d’antan n’apportaient pas systématiquement. Sauf cas exceptionnels, bien qu’agréables à écouter, souvent musicaux, les amplificateurs et enceintes acoustiques dits « vintage » avaient une reproduction bouchée, parfois sombre, souvent monotone, qui excluait, la plupart du temps, la sensation d’émotion intense. De plus l’outrage du temps ne va pas forcément dans le sens d’une optimisation de la reproduction musicale. Au bout d’un certain temps, des interventions sont nécessaires pour redonner un coup de jeune aux produits anciens.
Avec l’arrivée du « numérique » dans les années 1980, les concepteurs d’amplificateurs et d’enceintes acoustiques, puis de sources, ont repensé leur approche technique qui inclut des composants et matériaux nouveaux permettant d’apporter une reproduction plus neutre, plus ouverte, plus précise – une sorte de rupture avec le passé, qui conviendra à certains et pas forcément à d’autres, selon un degré d’exigence et de sensibilité qui est, finalement, très personnel.
Les « critiques de tous poils » remettent en question la qualité de fabrication, les nouveaux composants électroniques, les nouveaux matériaux mécaniques mis en application pour minimiser des phénomènes vibratoires et d’origine électromagnétique ou électrique. Je n’évoque même pas l’allusion à l’externalisation en Chine qui constitue aussi une part importante dans ces critiques subjectives et de mauvais goût.
Il est absurde de penser et d’en faire une règle générale en martelant que les composants électroniques, et plus généralement les produits HIFI actuels ont une durée de vie bien inférieure à celle de leurs aînés. Je précise par expérience que chaque époque a été marquée par des appareils prestigieux et d’autres qui le furent moins.
Par ailleurs de telles affirmations purement « gratuites » jettent un discrédits sur les concepteurs et petits manufacturiers qui s’appliquent à donner à la musique une âme, et qui souffrent de voir s’afficher de tels propos sur la place publique.
La question de prix parfois astronomiques ou question d’esthétiques dictées par des contraintes techniques précises sont aussi la cible de ceux qui ne peuvent avoir accès à des éléments audio prestigieux. A cela vient s’ajouter une démarche marketing de la part des grands groupes à qui appartient les marques les plus prestigieuses, et conduit à de vives critiques qui n’ont plus rien à voir avec le sens de la démarche audiophile.
Ces arguments contre productifs viennent troubler les réflexions des amoureux de « beau son » et d’émotions, ou plus simplement de très beaux et bons appareils – quelque soit leur origine.
De mon point de vue, c’est une hérésie de vouloir opposer et même comparer les produits « vintage » aux produits contemporains. Dans une « approche » pragmatique, il est recommandé de bannir ce genre de propos stériles, inutiles, qui ne sont, en définitive, fondés sur rien de concret, et sèment le trouble dans les réflexions de ceux qui veulent approcher la reproduction musicale de manière sereine.
Vous l’aurez compris, le duel vintage-contemporain tel qu’il est énoncé n’a pas du tout de sens.